Le concept de ‘cultures numériques’ fait partie de mes réflexions quotidiennes depuis un bon bout de temps. Il était l’objet de mon Master, j’en ai fait des centaines de lectures, une veille quotidienne, deux mémoires, puis mon cœur de métier. Mais je n’ai jamais pris le temps de poser des mots sur pourquoi ces cultures numériques, et notamment celles des nouvelles générations, me passionnent tant.
Et surtout, pourquoi j’estime qu’il est urgent que l’on s’y intéresse collectivement de plus près afin d’assurer notre rôle d’adulte.

Déjà, c’est quoi les cultures numériques ?
Ce sont les récits, codes, références, esthétiques, valeurs ou encore imaginaires collectifs qui émergent et se développent en ligne. Elles peuvent toucher le grand public ou au contraire être rattachées à des communautés plus niches.
Étudier les cultures numériques, c’est donc affiner sa compréhension des pratiques numériques – qui elles renvoient à quelque chose de plus concret et de l’ordre de l’usage.
Pour illustrer simplement, si je m’intéresse aux adolescents sur TikTok :
- Angle pratiques numériques : combien d’adolescents ont un compte TikTok ? Quel usage en ont-ils ? Combien de temps y passent-ils quotidiennement ? Quelle part de leur temps d’écrans cela represente-t-il ?
- Angle cultures numériques : quels contenus et récits circulent sur TikTok auprès des ados ? Quels leviers éditoriaux ou discours retrouve-t-on régulièrement ? Qu’est-ce que cela révèle de leurs manières de penser, d’appartenir et de s’exprimer ?
Je prends le cas de TikTok, mais les cultures numériques s’enracinent dans l’ensemble des univers digitaux (les réseaux sociaux, les messageries en ligne, les sites de streaming…).
5 raisons de s’intéresser aux cultures numériques des nouvelles générations
(pas juste pour être cool, mais pour assurer nos missions d’éducation)
1. Parce qu’elles sont passionnantes et riches de sens
Pour commencer : non, tout ce qui circule en ligne n’est pas vide ou abrutissant. Un avis aussi tranché me semble d’ailleurs compliqué à défendre étant donnée la diversité des formats, communautés et phénomènes en ligne.
Les cultures numériques sont au contraire d’une incroyable richesse. Elles regorgent de créativité, réflexion, solidarité, engagement et même de poésie.
Chaque jour, des iniatives de pros ou d’amateurs émergent sur les réseaux. Qu’elles perdurent ou non, certaines traversent différents publics et alimentent nos imaginaires collectifs.
Les observer est donc une manière de rester à l’écoute de la société.
Et donc, me concernant, observer les cultures numériques juvéniles me permet de rester à l’écoute de mon sujet sociétal de prédilection : les jeunesses.
2. Parce qu’elles sont profondément liées au réel
Les cultures numériques juvéniles en disent énormément sur les jeunesses d’aujourd’hui (et donc sur les adultes de demain).
Bien qu’elles naissent dans des espaces numériques, elles s’inspirent des ‘vraies vies’ des jeunes et les transforment en retour. Elles sont donc liées de près à leurs centres d’intérêt, à leurs manières de raconter, de s’informer, de s’introspecter, de se connecter ou encore de voir le monde.
Les ignorer (voire les mépriser), c’est manquer (voire nier) une grande part du vécu des jeunes générations.
3. Parce que sans elles, le dialogue est bancal
Comment alimenter ce fameux dialogue intergénérationnel, notamment celui autour ‘des écrans’, si on ne comprend pas un minimum les codes et références de nos jeunes interlocuteurs ?
Et pas besoin d’être bilingue en “djeunz” : maîtriser les notions de base permet de fluidifier les échanges, en abordant avec pertinence et respect leurs réalités.
4. Parce que notre rôle est de prendre soin des plus jeunes
Les jeunes baignent dans des environnements numériques complexes, parfois anxiogènes voire dangereux.
Raison de plus de ne pas les lâcher dans la nature et les laisser s’y débrouiller.
À nous de nous y intéresser pour de vrai. Pour les accompagner, les protéger et les outiller – via l’apprentissage quotidien de l’esprit critique par exemple.
5. Parce que le numérique structure leur adolescence
Depuis toujours, les quêtes de l’adolescence sont les mêmes : autonomisation, validation par les pairs, construction identitaire, affirmation de soi et de ses opinions, développement de ses propres centres d’intérêt…
Et les possibilités qu’offrent les réseaux pour assouvir ces besoins sont efficaces : bricoler sa personnalité via ses différents profils ou son activité sur les réseaux, multiplier les interactions, intégrer de nouveaux groupes, s’embellir avec des filtres, trouver ses propres sources d’informations…
Et c’est là encore notre rôle d’adulte de les accompagner face à ces tentations faciles, en comprenant au mieux les logiques de l’adolescence à l’ère du numérique.
Les cultures numériques sont une clé essentielle pour mieux comprendre et donc mieux accompagner les jeunes générations. Néanmoins, leur complexité et la vitesse à laquelle elles évoluent peuvent décourager.
Mon conseil est de ne pas se mettre trop de pression, en cherchant à devenir un expert du sujet qui serait au courant de tous les derniers phénomènes culturels numériques (ce serait de toute façon impossible).
Je crois que de simples bases peuvent suffire à se sentir plus en maitrise : comprendre les grandes logiques des univers connectés, s’informer sur les principaux contenus ou évènements, se créer un compte sur les réseaux ou demander à quelqu’un de nous les montrer, mais surtout DIALOGUER AVEC LES PLUS JEUNES.
Il faut en effet accepter que les jeunes ont souvent plus d’expertise sur nous sur tout ce qu’il se passe en ligne. Alors commençons par nous intéresser à leurs pratiques, à aborder le sujet avec curiosité et respect. Et nourrissons nous de leurs savoirs et expériences individuelles pour leur proposer l’accompagnement le plus pertinent possible.
Continuons la discussion !
Je propose de la formation, de la consultance, de la conception de dispositifs intergénérationnels. Mais surtout, j’adore échanger sur le sujet et imaginer de nouveaux formats pour aborder tous ces enjeux.
Ecrivez-moi par mail à johanna.mccarthy13@gmail.com ou sur Linkedin.